D'origine finlandaise, je suis arrivée en Suisse en 2010, à l'âge de 19 ans. Passionnée par les langues et les cultures, mon séjour avait pour but de me permettre de perfectionner mon français pour pouvoir entrer dans la faculté de traduction et d'interprétation de l'Université de Turku. Par un hasard du destin (la première rencontre avec mon compagnon), cette année linguistique s'est prolongée et est devenue une quête de moi, une poursuite de mes rêves, et un parcours de tâtonnement expérimental* culturel à durée indéterminée.
Après mes deux premières années de bain culturo-linguistique intensif en Suisse, j'ai décidé de commencer mes études dans la faculté des lettres à l'Université de Fribourg. Cette décision s'est faite suite à ma réalisation que ma passion pour le fonctionnement et les caractéristiques inhérentes des langues ne pouvait être assouvie par l'interprétariat, et que je devais par conséquent m'orienter plutôt vers les sciences du langage. Quelle heureuse décision! J'ai trouvé dans les séminaires de linguistique anglaise du Prof. Didier Maillat ce qu'il fallait pour alimenter mon dynamisme naturel*. Par un concours de circonstances, je me suis également trouvée à un cours sur des approches anthropologiques des langues donné par la Prof. Aline Gohard-Radenkovic. J’ai été fascinée par le sujet, ce qui m'a finalement amenée à changer de domaine secondaire. Et c'est là, dans le département du plurilinguisme et de la didactique des langues étrangères, que j'ai trouvé ma deuxième grande passion : l'enseignement.
Animée par mes deux passions, j'ai poursuivi mon parcours universitaire lors duquel j'ai eu l'honneur de collaborer avec le Prof. Didier Maillat dans le cadre du programme doctoral "Language and Cognition", dont je suis la coordinatrice depuis 2015**. Après un stage d'enseignement du FLE chez ORS j'ai également eu la chance d'obtenir un poste d'enseignante au sein de cette organisation. Ces deux précieuses expériences m'ont convaincue du fait que c'était bien dans ces deux domaines - les langues et l'enseignement - que je voulais faire ma carrière.
J'avais toujours été fascinée par le métier d'enseignant, et reconnaissante envers tous les enseignants qui avaient cru en moi, qui m'avaient donné l'envie d'apprendre et qui m'avaient transmis l'amour du travail bien fait. Par la suite, mes expériences dans l'enseignement ont suscité en moi une envie, pour ne pas dire un besoin, de poursuivre le travail de ceux qui m'ont précédée dans ce milieu, et surtout d'aider les jeunes à (re)trouver la confiance en eux et la motivation qui donnent l'élan vital à l'apprentissage. Faisant moi-même partie d'une petite minorité de 4% de diplômés universitaires venant de milieux modestes en Suisse (Plancade, 2017), je reconnais le rôle que la compétence professionnelle de mes enseignants a joué dans ma réussite scolaire.
Cette réalisation m'a amenée à me poser beaucoup de questions pendant la formation pédagogique à l'Université de Fribourg - qu'est-ce qui fait que certains jeunes font mentir leur destin statistique (Astolfi 2008: 85), et comment, en tant qu'enseignant, peut-on exploiter au mieux les marges d'efficacité didactique (ibid.) dans cette équation? Comment faire pour que le fonctionnement scolaire, avec ses évaluations et ses contraintes, n'étouffe pas la motivation intrinsèque des élèves (ibid. 69)? Et au fond, comment rendre les élèves autonomes, maîtres de leur propre apprentissage, et prêts pour la vie en société?
C'est en quête des réponses à ces questions que je débute ma carrière dans l'enseignement au secondaire supérieur, et je tâche de puiser dans mes expériences personnelles des systèmes scolaires finlandais et suisse pour alimenter mes réflexions au fil de cette carrière.
*) J'emprunte ces deux termes à l'un des plus grands pédagogues du 20e siècle, Célestin Freinet.
**) https://www3.unifr.ch/english/en/studies/phd/doctoral-programme-language-and-cognition/.
Plancade, Joan (2017) "La mixité sociale tarde à gagner l’université suisse." In Bilan. Repéré à https://www.bilan.ch/tv-bilan/la_mixite_sociale_tarde_a_gagner_l_universite_suisse. Consulté le 22 janvier 2019.
Astolfi, Jean-Pierre (2008) La saveur des savoirs. Paris: ESF.