Le travail effectué dans le cadre de ce premier module (cliquez ici pour y accéder) ainsi que la séance elle-même m’ont donné une vue bien plus holistique de mes élèves en tant qu’utilisateurs de médias et de technologies que celle que j’avais auparavant. Je les avais souvent vus sur leurs téléphones portables, dans les couloirs de l’école et même dans les salles de cours, mais je n’avais jamais pensé que malgré cette compétence numérique apparente, ils sont en réalité relativement démunis en termes d’outils qui leur permettraient d’utiliser le numérique à des fins réellement didactiques. Comme le précise Bruillard (2012), « si les jeunes générations sont très utilisatrices des technologies informatiques ou numériques qui leur sont proposées, elles s'en servent assez peu à des fins d'apprentissage ». Ils sont donc tout à fait compétents en matière de jeux et de la consommation passive des médias, mais il leur manque bien souvent les connaissances pour une utilisation productive du numérique.
Mes élèves, bien qu’ils « habitent le virtuel », et par ce fait « n’ont plus le même rapport au monde » (Serres 2011), ont donc toute de même besoin d’être guidés et orientés dans leur utilisation des MITIC. L’éducation aux médias et à la culture informationnelle ne doit pas seulement permettre aux élèves de devenir des utilisateurs productifs de ces outils, mais également des utilisateurs conscients : conscients des effets négatifs d’une utilisation inadaptée des MITIC et des règlements sur la publication des contenus et le comportement à adapter en ligne. En effet, comme l’a démontré l’étude JAMES sur l'utilisation des médias et les loisirs des jeunes de 12 à 19 ans en Suisse (Waller et al. 2016), il n’est pas rare que les jeunes aient été victimes de cyberharcèlement, de violence ou de violation de la protection des données. En plus d’être victimes d’un comportement inadapté de la part d’autres utilisateurs des MITIC, les jeunes sont également souvent victimes de leurs propres mauvais habitudes numériques : nombreux sont les élèves adeptes d’un comportement « multitâche » lors des activités d’apprentissage, ou ceux qui ignorent les enjeux et les intentionnalités derrière le numérique. Comme l’ont démontré Kirschner et De Bruyckere (2017), une compétence « multitâche » est en effet un mythe, du fait que cognitivement parlant il n’existe pas de traitement simultané de tâches : il s’agit plutôt d’un traitement séquentiel, qui entrave aussi bien la concentration que l’apprentissage. En plus des comportements multitâches des jeunes, ils ignorent souvent les intentionnalités derrière les écrans, et deviennent ainsi des « victimes d’une consommation effrénée de produits sans cesse renouvelés » (Lévy 2013). L’éducation aux médias et à la culture informationnelle doit donc sensibiliser les élèves non seulement à leurs droits et leurs responsabilités en tant qu’internautes, mais également aux enjeux de l’utilisation des MITIC.
L’internet et les outils numériques ne sont donc pas mauvais en soi, mais plutôt l’usage que l’on en fait – les MITIC présentent de nombreuses ouvertures intéressantes dans le domaine de l’enseignement ainsi que dans la vie quotidienne de mes élèves, et donnent en effet accès à un flux d’informations qui est fondamental aussi bien pour les relations humaines que pour la vie scolaire de mes élèves (cf. Appel 2016). L’étude d’Appel (2016 : 63) démontre qu’il n’y a pas de corrélation significative entre le sentiment d’isolement sociale et l’utilisation de l’internet, mais que l’internet peut contrairement contribuer à l’entretien des relations déjà existantes. Ainsi, le numérique fait désormais partie intégrante de la vie et du parcours scolaire de mes élèves, et pour cette raison il est important de leur apprendre à l’exploiter de manière bénéfique et responsable.
Le plan d’études romand souligne l’importance de l’éducation aux médias et de l’apprentissage des outils numériques, définis comme suit (Bonvin 2014) :
Avant la rédaction de mon travail pour le premier module du cours sur l’intégration des MITIC dans la pratique scolaire, je n’avais pas réalisé que l’éducation aux médias et l’apprentissage des outils numériques par les élèves font partie des apprentissages disciplinaires, et que je serais ainsi pleinement concernée par ce domaine d’études. Et pourtant cela découle logiquement de la transversalité des MITIC…
Liste non-exhaustive :