Meirieu, Philippe (2017) "Suffit-il d'enseigner pour que les élèves apprennent?" Conférence à l'Université de Fribourg, le 7 septembre 2017
Le principe fondateur de l’école Nouvelle de la Prairie de Toulouse, fondée en 1969 par Marie de Vals
Alain (1932) Propos sur l’éducation
Qui est Philippe Meirieu ?
Que signifie être enseignant aujourd’hui ?
Qu’est-ce que j’attends de la formation ?
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1. Ne jamais renoncer à sa passion de transmettre. Le métier ne se réduit pas aux compétences: réunir ces compétences dans une verticalité: s'inscrit dans une histoire et se projette dans le futur. La passion est le "foyer mythologique" où nous puisons notre énergie tout au long de notre carrière.
2. Faire de la résistance un levier pour puiser à notre enseignement. Réinterroger sur sa façon d'enseigner.
3. Prendre du plaisir à inventer sans cesse de nouvelles médiations.
4. Il ne faut pas se demander ce que l'on va dire pendant le cours, mais plutôt ce que l'élève va faire pour accéder à ces concepts. Quelle activité mentale permettra l'apprentissage? Quels processus va-t-il mobiliser pour avoir une maîtrise opérante?
5. Organiser le travail, et non pas la discipline.
6. Exiger la perfection
7. Faire émerger la motivation dans le travail - Le travail doit être proposé dans une forme qui suscite la motivation! La bonne école n'est pas celle où l'élève fait ce qu'il veut, mais où il veut ce qu'il fait.
8. Accompagner l'élève dans le nécessaire renoncement à être le centre du monde. Lui permettre d'entre la résistance des êtres et des choses à sa volonté de toute-puissance.
9. Mettre la probité au cœur de notre comportement et toutes nos activités: nous ne sommes pas infaillibles, nous ne pouvons pas dissimuler des faits qui contredisent nos opinions ni considérer la validité d'une parole en fonction du statut de celui qui le dit, ou la relation que nous entretenons avec lui. Exigence de justesse, de précision, de vérité, et accepter que l'autre personne existe avec ses propres vérités.
10. Prendre nos élèves comme ils sont et là où ils sont, mais ne jamais se résigner à les laisser s’enfermer dans ce qu’ils sont… ou les laisser là où ils sont.
11. Savoir que nous n’aurons jamais le pouvoir sur la liberté de l’autre, mais que nous pourrons toujours améliorer les situations pédagogiques que nous construisons pour faire en sorte que l’autre mobilise sa liberté d’apprendre. L'instruction est obligatoire mais l'apprentissage ne se décrète pas; nul ne peut déclencher mécaniquement le désir d’apprendre chez quelqu’un, même dans une structure où tout est programmé et organisé. Nous ne pouvons que créer les conditions qui permettent l’émergence de ce désir, sur lequel nous n’avons pas pouvoir direct (Meirieu, P. 2016. http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2016/06/03062016Article636005337926653002.aspx).
12. Ne jamais perdre de vue que ce qui vaut la peine d’être enseigné, c’est ce qui libère et unit les hommes : la culture.
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L'un de mes objectifs pour l'année pédagogique était d'apprendre à mieux connaître les enjeux liés à l'enseignement au secondaire II aujourd'hui. Je crois que les propos de Philippe Meirieu sont extrêmement utiles à cet égard. L'évolution de l'enseignement, de la société et du rôle de l'école m'a aidée à comprendre certaines réactions de mes élèves: la frustration de quelques uns concernant le rythme qu'ils doivent adopter en classe, l'abandon de certains face aux difficultés, ou encore la non-volonté de certains autres d'apprendre des choses dont ils ne voient pas l'utilité sur le moment. Les points qui m'interpellent le plus dans les propos de Meirieu et que j'essaie de mettre en oeuvre dans mon enseignement sont les suivants:
Ma pratique d'enseignement est basée sur ces trois principes, ce qui veut dire que j'assume le rôle de médiatrice entre le savoir et mes élèves, dont l'apprentissage dépend de la qualité de ma transposition didactique. J'essaie de varier mes méthodes aussi souvent que possible, et de laisser également aux étudiants la possibilité d'enseigner.
Je trouve que le choix des contenus a également un rôle très important dans l'apprentissage: il faut que le matériel proposé à l'élève provoque chez lui l'envie de découvrir la matière. C'est pour cette raison que je choisis toujours les contenus avec le plus grand soin, et que je veille à ce que chaque cours implique les élèves émotionnellement (matériel amusant, intriguant, actuel, polémique...).
J'encourage également mes élèves à se fixer des défis et des objectifs à court et à long terme, pour qu'ils puissent avoir l'expérience de gratification qui vient du fait que leurs efforts portent fruit. C'est d'ailleurs le sentiment de gratification qui permettrait de lutter contre la dépression, qui est un grand défi dans les sociétés modernes (Seligman, Martin E. P. 2002. Authentic Happiness: Using the New Positive Psychology to Realize Your Potential for Lasting Fulfillment. New York: Free Press).
La pédagogie différenciée ne demande guère de justifications. Si nous ne voulons pas nous résigner à enseigner qu'à ceux qui n'ont pas besoin de nous pour apprendre, l'enseignement différenciée s'impose; et cela d'autant plus depuis la démocratisation de l'enseignement. Le même constat va pour le choix de contenus: il a été prouvé à maintes reprises que les stimuli émotionnelles créent des traces mnésiques plus durables que les stimuli neutres (cf. e.g. Tyng, Amin, Saad and Malik 2017). Je crois fermement que chaque enseignant est assigné à l'inventivité pédagogique, parce que c'est en la facilitation de l'accès au savoir que consiste notre travail. De plus, si ce n'est pour le côté affectif et humaine de ce métier, il n'a pas de raison d'être. L'école a sa place dans la société moderne pour aussi longtemps qu'elle a quelque chose de plus à offrir aux élèves que le savoir froid (cf. Jean-Pierre Astolfi sur les savoirs engageants, Astolfi 2004: 254).